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En Thaïlande, les jeunes face à la monarchie et l’armée. Analyse d’Eugénie Mérieau

Vous avez peut-être déjà lu un entrefilet sur les nombreux rassemblements de protestation qui ont émaillé l’année 2020 en Thaïlande, et qui continuent en cette année 2021. Des manifestations organisées par la jeunesse estudiantine du pays qui ont rassemblé des dizaines de milliers de jeunes et qui se sont étendues à toutes les villes comptant des campus universitaires.

Comment est né ce mouvement ? Quels sont leurs modes opératoires ? Que réclament les protestataires ? Qu’en attendre à l’avenir ? C’est de cela que nous désirons vous entretenir aujourd’hui avec une analyse fouillée d’une experte reconnue de la Thaïlande, Mme Eugénie Mérieau, Dr en droit : En Thaïlande, les jeunes face à la monarchie et l’armée. Non sans vous en dire plus sur son auteure, Eugénie Mérieau donc, elle qui a écrit plusieurs ouvrages sur la Thaïlande, des livres qui vous permettront de mieux comprendre ce pays. En complément de son éclairante analyse, on vous dirige également vers un regard complémentaire sur cette situation complexe, celui du réalisateur Apichatpong Weerasethakul, palmé à Cannes et habitant Chiang Mai. Alors qu’une récente condamnation selon le fameux article 112 – appelé lèse-majesté – vient de tomber En terminant par un reportage d’ARTE Regards : Vers un printemps thaïlandais ?

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Le Pays du Sourire. Vraiment ?

Amazing Thailand – Le Pays du Sourire. Voilà comment est présentée la Thaïlande par les autorités touristiques du pays. Il est vrai qu’un touriste étranger de passage n’a que faire des spasmes politiques du pays visité, ne se préoccupant que de son bien-être durant la durée du séjour. Malgré un régime démocratique sans cesse remis à l’ordre par des coups d’État militaires, la Thaïlande réussit à attirer des touristes par dizaines de millions (l’année 2020 faisant exception, le tourisme étant en crise durant la pandémie sanitaire). C’est dire que ces derniers font peu cas du type de régime politique en place, celui-ci leur assurant une pleine sécurité.

Néanmoins, il nous apparaît essentiel de tenter de comprendre ce qui motive la jeunesse éduquée du royaume à se rebeller contre l’autorité représentée par le gouvernement militaire au pouvoir. Des militaires – auteurs de nombreux coups d’État – qui n’ont pas brillé en matière économique ces 50 dernières années en comparaison régionale

Une jeunesse qui se mobilise depuis plus d’un an, demandant sans relâche la démission du Premier ministre, Prayut Chan-o-cha, le général qui a fomenté le dernier coup d’État en date. Une jeunesse qui, pour la première fois et au grand étonnement – parfois réprobateur – de leurs aînés, ose critiquer ouvertement le roi (en l’honneur de qui des billets de banque commémoratifs ont été édités il y a peu).

En résumé, le mouvement estudiantin réclame la démission du Premier ministre, la réécriture de la Constitution thaïlandaise et la réforme de la monarchie. Des demandes qui ont amené plus de 40 militants à être inculpés en vertu de la loi de lèse-majesté pour avoir participé à des manifestations. Un mouvement soutenu notamment par les 5 finalistes du concours de Miss Grand Thailand, au premier rang desquelles la vainqueure, Nam.

Qui donc, mieux qu’Eugénie Mérieau, pouvait nous éclairer sur les raisons d’un mouvement de contestation qui ne faiblit pas ? Nous reproduisons ci-dessous son analyse éclairante sur la situation politique actuelle, publiée ce mois de janvier sur le site Le Monde Diplomatique1.

Elle revient sur les soubresauts historiques – parfois mortels – de cette contestation, sur le mouvement auquel dite contestation se réfère, sur la décision judiciaire qui a mis le feu aux poudres (la dissolution du parti Anakot Maï) et sur les revendications de cette jeunesse combattante (au sens politique du terme), elle qui noue des contacts avec son homologue hongkongaise. Sa conclusion est limpide : le tabou de la monarchie a sauté, et donc il n’est pas abusif d’affirmer que, quelle qu’en soit l’issue, ces manifestations ont déjà transformé en profondeur la politique thaïlandaise.


En Thaïlande, les jeunes face à la monarchie et l’armée1

La jeunesse thaïlandaise est dans la rue. Le 24 juin 2020, ils n’étaient qu’une petite cinquantaine à se retrouver au Monument de la démocratie, dans le centre de Bangkok, pour commémorer l’anniversaire de la révolution de 1932 ayant mis fin à la monarchie absolue dans ce qui s’appelait encore le « Siam », alors seul État indépendant d’Asie du Sud-Est. Trois mois plus tard, le 19 septembre, jour anniversaire du coup d’État militaire de 2006 qui mit un coup d’arrêt à la « transition démocratique », ils étaient plusieurs dizaines de milliers face au Palais royal.

La contestation actuelle s’inscrit dans la continuité du mouvement des « chemises rouges » (1), né en opposition à ce coup d’État — lequel appelait à « achever » la révolution de 1932 et à réhabiliter sa figure historique, Pridi Panomyong, juriste formé en France dans les années 1920, dans une IIIe République devenue le centre de formation des jeunes révolutionnaires de toute l’Asie. Mais, en 2010, ce mouvement est réprimé dans le sang : l’armée ouvre le feu sur les manifestants, en tuant quatre-vingt dix et en blessant près de deux mille, de quoi faire taire la contestation sociale.

Dix ans plus tard, les manifestants sont jeunes, voire très jeunes. En majorité lycéens et étudiants nés dans les années 2000, ils sont fans de K-pop, de Hunger Games et de Harry Potter, mais ils arborent aussi sur leurs tee-shirts le portrait de Somsak Jiemteerasakul, historien majeur, critique de la monarchie, né en 1958 et réfugié politique en France. S’ils n’ont pour la plupart que de vagues souvenirs de 2010, ils peuvent se prévaloir, en dépit de leur jeune âge, d’une déjà très riche expérience : deux coups d’État (2), quatre Constitutions (2006, 2007, 2014, 2017), la mort d’un roi — Bhumibol Adulyadej, en 2016, après soixante-dix ans de règne — et l’accession au trône de son successeur — Vajiralongkorn, couronné Rama X en 2019. Avec le soutien affiché d’une partie de leurs aînés, parents et professeurs, mais également d’anciennes « chemises rouges », ils réclament une réforme de la monarchie et une nouvelle Constitution.

Tout a commencé avec la dissolution du parti Nouvel Avenir (Anakot Maï) par la Cour constitutionnelle en février 2020. Ce dernier avait été fondé en mars 2018 par trois trentenaires : M. Thanathorn Jeungrungruangkit, l’héritier multimillionnaire d’une entreprise industrielle, M. Chaitawat Tulathon, éditeur de livres critiques à l’égard de la monarchie, et M. Piyabutr Saengkanokkul, professeur de droit public. Le parti participe à l’élection de mars 2019, la première depuis le dernier coup d’État militaire mené par le général Prayut Chan-o-cha. À la surprise générale, il obtient près de 20 % des suffrages, ce qui l’érige en troisième force politique du pays, après le parti politique des militaires et celui d’opposition des anciens premier ministres Thaksin Shinawatra et sa sœur Yingluck Shinawatra, renversés par les coups d’État de 2006 et 2014 respectivement. Au Parlement, où siègent cinq cents députés, les quatre-vingts élus de Nouvel Avenir — dont la première parlementaire trans de l’histoire du royaume — exigent la fin du service militaire et une réduction du budget de l’armée. Plus tabou encore, ils s’opposent frontalement aux décrets du roi, notamment au transfert d’une partie des effectifs militaires sous son commandement direct. Ces prises de position en rupture avec l’establishment militaro-monarchique, tandis que le premier parti d’opposition se mure dans le mutisme, leur gagnent de nombreuses faveurs, notamment parmi ceux qui veulent dépasser l’ancien clivage jaune-rouge (3) de leurs parents au sein duquel ils ne se reconnaissent pas.

Des campus universitaires en effervescence, ici à la CMU © Facebook – สิทธิ จันทร์เพ็ญ

Nouvel Avenir, au logo orange, s’était dès sa fondation engagé dans une stratégie « populiste de gauche », faisant le pari d’un dépassement des oppositions entre zones urbaines et rurales, entre classes moyennes et classes populaires, en désignant un ennemi commun : l’oligarchie militaro-monarchique. Cette stratégie, couronnée de succès, explique l’ampleur de la mobilisation actuelle. Après la dissolution du parti, alors que les dirigeants sont frappés d’une peine d’inéligibilité de dix ans, leurs électeurs et leurs soutiens partout dans le pays décident de réagir, bien que la crise du Covid-19 les empêche dans un premier temps de se rassembler. Le gouvernement décrète l’état d’urgence et impose même pour quelques semaines un couvre-feu à 23 heures.

C’est dans ces conditions qu’est annoncée, début juin 2020, la disparition de M. Wanchalerm Satsaksit, un militant de 32 ans proche des électeurs de Nouvel Avenir, qui s’était enfui au Cambodge après 2014, comme nombre de ses pairs. Que son meurtre ait été commandité par le régime ne fait que peu de doute : depuis 2016, plusieurs opposants en exil ont ainsi « disparu » avant que leur corps ne soit retrouvé flottant dans les eaux du Mékong, lesté de pierres à la place des entrailles.

Une œuvre du caricaturiste thaïlandais Pssyppl. © Facebook

Peut-on vraiment qualifier le système politique thaïlandais de « monarchie constitutionnelle » ? Certes, en 1932, le Siam adopte sa première Constitution. À l’issue d’un conflit entre les promoteurs de la révolution et le roi sur les prérogatives royales, ce dernier abdique en 1935. S’installe alors une période de régence, durant laquelle le pays se militarise puis entre dans la seconde guerre mondiale aux côtés du Japon… avant de se revendiquer vainqueur avec les Alliés. Non seulement la société siamoise échappe au sort japonais d’une démilitarisation forcée, mais les Américains soutiennent massivement l’armée dans le cadre de leur politique de containment (« endiguement ») anticommuniste dans la région. En 1958, après une prise de pouvoir par coup d’État, le général Sarit Thanarat s’inspire de de Gaulle pour se faire tailler une Constitution sur mesure incluant un article sur les pleins pouvoirs : l’« article 17 » sera utilisé pour réprimer les communistes, les républicains et les démocrates, décréter des exécutions sommaires et développer l’économie du pays.

Dans le même temps, le régime militaire s’emploie à faire renaître la monarchie de ses cendres et reprend en main le bouddhisme, monarchie et religion étant considérées comme les parfaits antidotes aux idées communistes. La stratégie se traduit par un relatif échec, les idées marxistes se diffusant massivement dans les villes et les campagnes tout au long des années 1960 et 1970, aboutissant en 1973 à une grande manifestation à Bangkok pour réclamer la démission des militaires du gouvernement. Ces derniers partiront en effet, abandonnés par une monarchie soucieuse de se réinventer en force prodémocratie.

Néanmoins, cette victoire des manifestants est de courte durée : en 1976, les milices paramilitaires proches du Palais massacrent les étudiants « marxistes » par dizaines, organisant des lynchages publics et des viols. Un épisode qui laisse un traumatisme béant dans la conscience collective des Thaïlandais, et qui signe le retour de l’armée en politique. Depuis 1976, malgré des flux et des reflux, l’armée et la monarchie conservent un rôle politique de premier plan.

Avec son accession au trône, le nouveau roi Vajiralongkorn donne une impulsion néo-absolutiste. Il s’approprie les « biens de la Couronne », financés par le budget de l’État et par des dividendes issus des grandes entreprises thaïlandaises — ce qui en fait le monarque le plus riche du monde (4). Il s’octroie le pouvoir de nomination du chef de l’Église bouddhique, et place une partie de l’armée sous son commandement direct. Il demande également à ce que soit révisée la Constitution adoptée par référendum, pour que soit supprimée la nécessité d’une régence en cas d’absence du royaume. Et pour cause : il a passé la majorité de son début de règne hors du pays, dans une immense villa en Bavière.

Pas étonnant que, le 26 octobre 2020, les manifestants décident de marcher jusqu’à l’ambassade d’Allemagne ; ils exigent, par une lettre remise à l’ambassadeur, que Berlin fasse toute la lumière sur les agissements du roi dans sa villa bavaroise. Attaqué, Vajiralongkorn se résout à repousser son départ pour orchestrer une campagne de communication visant à se construire une image de monarque populaire. Plusieurs manifestations royales sont organisées, au cours desquelles il se rend au contact de ses sujets agenouillés. À certains d’entre eux, il fait passer des messages politiques, soigneusement enregistrés sur iPhone et diffusés sur les réseaux sociaux comme « images volées ». Il s’adresse ainsi à Buddha Issara, un moine ultranationaliste faisant l’apologie de la violence contre les antiroyalistes, lui renouvelant son soutien. À un quidam qui avait organisé une contre-manifestation proroyaliste, il déclare : « Quel courage, quelle bravoure, merci bien », triptyque vite devenu un mème dans les manifestations, et l’instrument d’incessantes moqueries sur le Web.

© Facebook – Politics Kalaland (การเมืองไทย ในกะลา)

À un journaliste de CNN (5) l’interrogeant au cours d’un de ces bains de foule sur ce qu’il avait à dire « aux jeunes qui manifestent », il répond : « Nous les aimons tout autant. » Et à la question « Y a-t-il une place pour le compromis ? », il assure tout sourire : « La Thaïlande est la terre des compromis. »

Il peut, en effet, se targuer d’en avoir réalisés : en 2017, il ordonne un moratoire sur la loi de lèse-majesté, immédiatement appliquée par la police, l’armée et la justice. Plus de doute pour savoir qui, de l’armée ou du roi, « commande » : le régime militaire est sous commandement royal. C’est la raison pour laquelle les jeunes Thaïlandais adressent leurs revendications directement à Vajiralongkorn plutôt qu’au premier ministre, le général Prayut, perçu comme son intermédiaire.

Ils demandent notamment le retour au régime de séparation entre les biens de la Couronne et les biens personnels du roi. Le 14 octobre 2020, lorsqu’un convoi royal passe à proximité des manifestants, ces derniers ne se prosternent pas devant la reine, comme le veut la tradition, mais chantent : « Mes impôts, mes impôts, rendez-moi mes impôts. » Le budget annuel alloué à la monarchie s’élève à environ 1 milliard d’euros pour 2020, plus quelques milliards répartis entre les ministères pour l’organisation des cérémonies royales, la mise en œuvre des projets royaux, l’achat et l’entretien des avions royaux, la protection royale, etc. Et si ce budget servait à financer un État social ? Dans les manifestations, les participants sont donc invités à choisir quelle réallocation leur paraîtrait la plus appropriée : congé parental, sécurité sociale, retraites… Certains militent en faveur d’un revenu de base universel pour les jeunes, une proposition également portée par le Nouvel Avenir.

Si cette contestation s’inscrit dans la continuité du mouvement des « chemises rouges », elle s’en éloigne par ses nombreuses revendications sociétales, son rejet des hiérarchies et de l’autorité. Et il n’y a pas de leaders désignés.

Eugénie Mérieau

Mais la contestation porte sur tous les aspects de la société, et en particulier contre la « culture de l’autoritarisme » : contre la cérémonie du wai khru, au cours de laquelle écoliers, collégiens et lycéens se prosternent aux pieds de leurs professeurs pour leur rendre hommage, contre le port de l’uniforme, contre la coupe de cheveux exigée à l’école, contre le service militaire, contre le harcèlement sexuel, pour l’avortement, pour les droits LGBT. La figure de proue des manifestants, Mme Panusaya « Rung » Sithijirawattanakul, 22 ans, désignée par la British Broadcasting Corporation (BBC) comme l’une des « 100 femmes les plus influentes (6) » du monde cette année, avait été l’une des premières à dénoncer, en 2019, les violences sexuelles au sein du mouvement des étudiants du parti Dome Revolution à la prestigieuse université Thammasat (l’AFP vous la présente dans cet article). Si cette contestation s’inscrit dans la continuité du mouvement des « chemises rouges », elle s’en éloigne donc par ses nombreuses revendications sociétales, son rejet des hiérarchies et de l’autorité. Et il n’y a pas de leaders désignés.

Les manifestants ont également innové dans les techniques de mobilisation. Les « chemises rouges » se rassemblaient les week-ends, organisant d’immenses manifestations dans des stades, au cours desquelles se succédaient discours, concerts, shows comiques, karaokés, spectacles de drag queen et danses, pendant de longues heures voire des semaines — pour se transformer parfois en campements de longue durée. La nouvelle génération reprend ce côté festival-campement, pour des manifestations impressionnantes de professionnalisme : scènes sécurisées, système sonique ultraperformant, camions Internet déployés pour offrir du signal 4G aux manifestants en cas de coupure, drones de surveillance.

Leur financement participatif doit beaucoup, comme en 2010, aux célébrités et à de riches femmes et hommes d’affaires mais surtout, ils comptent désormais une force dotée de superpouvoirs sur Internet : l’ « armée » de la K-pop thaïlandaise.

Les manifestants tournent leur regard vers Hongkong, d’où ils importent des techniques de flash mob, moins coûteuses, se caractérisant par des manifestations quotidiennes et mobiles, l’usage de parapluies et de lasers, et dernièrement, de canards jaunes gonflables. Cette circulation de techniques entre Hongkong et Bangkok s’accompagne d’un développement de solidarités au sein de la Milk Tea Alliance, l’alliance des « pays qui boivent du thé au lait », contre la Chine et ce qu’elle représente de verrouillage de la liberté d’expression. M. Joshua Wong, l’une des figures de la contestation hongkongaise, s’est même piqué d’une lettre à l’entreprise américaine NonLethal Technologies, qui fabrique les grenades lacrymogènes utilisées dans les deux villes, signée des manifestants thaïlandais et hongkongais.

Jusqu’à présent, le pouvoir militaire thaïlandais a fait preuve d’une certaine retenue face aux manifestants, qui contraste avec la brutalité de la répression en 2010 : gaz lacrymogènes et canons à eau à deux reprises au cours de ces longs mois de manifestations quasi quotidiennes. Cela ne tient pas à la nature du régime — démocratie civile alors, contre régime militaire semi-démocratique aujourd’hui —, mais davantage au statut social des manifestants. En 2010, les « chemises rouges » tuées à balles réelles par l’armée étaient appelées péjorativement « buffles rouges » : il s’agissait de provinciaux, à la peau foncée, considérés comme illettrés, moqués pour leur accoutrement et leurs manières, traités de communistes, de révolutionnaires et de terroristes. Aujourd’hui, les manifestants sont majoritairement de jeunes urbains, clairs de peau, instruits, en uniforme immaculé, souvent sino-thaïs, des Bangkokiens de la classe moyenne. Tire-t-on sur ses propres enfants ?

Toutefois, plusieurs sources confirment que le régime incite les militaires et policiers à passer l’habit jaune royaliste pour participer à des contre-manifestations, intimider et éventuellement générer des affrontements. Jusqu’alors, cette tactique a été vaine : les royalistes peinent à recruter, et, quand ils y parviennent, c’est davantage en souvenir de l’ancien roi Bhumibol qu’en soutien au régime actuel.

Le tabou de la monarchie a sauté. Quelle qu’en soit l’issue, ces manifestations ont déjà transformé en profondeur la politique thaïlandaise

Eugénie Mérieau

Contrairement à 2010, le dialogue ne semble pas impossible. Dans les émissions de débat télévisé, comme la quotidienne « Tham trong » (« question directe »), les invités des deux camps débattent sans (forcément) finir par s’insulter, telle l’émission du 27 novembre sur les finances de la monarchie, qui affiche près d’un million et demi de vues sur YouTube.

© Facebook – Télérama

Comme Mme Carrie Lam, cheffe de l’exécutif à Hongkong, M. Prayut table sur un essoufflement du mouvement à la faveur de l’arrestation de personnes considérées comme « leaders ». Néanmoins, les juges thaïlandais, notamment dans les cours de première instance, n’ont pas tellement coopéré, se montrant bien plus indulgents à l’égard de ces jeunes qu’ils ne l’avaient été face aux « chemises rouges ». Alors que « Rung » et d’autres figures du mouvement étaient arrêtées pour organisation de manifestation non autorisée, les juges les ont libérées sous caution, après quelques jours de détention provisoire. C’est sans doute la raison pour laquelle le régime, probablement sur ordre du roi, a décidé de rétablir la loi de lèse-majesté. Contre toute attente, les manifestants accusés de lèse-majesté depuis le 30 novembre dernier n’ont pas été placés en détention provisoire. La défection d’une partie des juges est, faut-il le rappeler, un signe précoce de l’imminence d’un changement de régime.

Dans tous les cas, le tabou de la monarchie a sauté, et donc il n’est pas abusif d’affirmer que, quelle qu’en soit l’issue, ces manifestations ont déjà transformé en profondeur la politique thaïlandaise. Les anciens laisseront la place à cette nouvelle génération, qui ne croit ni en l’armée ni en la monarchie. Comme l’un des mots d’ordre des manifestants le dit clairement : « Vous avez voulu déconner avec la mauvaise génération… cela va devoir s’arrêter avec notre génération. »

Bien que vous puissiez lire aujourd’hui cet article dans son intégralité, nous vous invitons à soutenir Le Monde Diplomatique, le journal qui l’a initialement publié. N’hésitez pas à vous y abonner !


Qui est Eugénie Mérieau ?

On se lasse de tout, excepté d’apprendre ! Nul doute qu’Eugénie Mérieau s’est fait sienne cette devise chère à Virgile. Elle est en effet au bénéfice d’une triple formation universitaire : en sciences politiques (Sciences-Po), en droit (Sorbonne) et en langues et civilisations orientales (Inalco).

Sa thèse de doctorat trahit ses excellentes connaissance du royaume de Thaïlande : Le constitutionnalisme thaïlandais et les transplantations juridiques : une étude de la royauté. Un travail honoré du Prix Varenne de thèse 2018 (Démocratisation) de la fondation Varenne, ainsi que du prix honorifique Levy-Ulmann (Droit et Sciences politiques) 2018 de la Chancellerie des universités de Paris. Une thèse traduite en langue anglaise et qui le sera même en thaï l’année prochaine.

Après quoi elle a rejoint la chaire de constitutionnalisme comparé à l’université de Göttingen, en Allemagne. Chercheure invitée post-doctorale à l’Institut pour le droit et la politique mondiale (IGLP, faculté de droit de Harvard), elle est actuellement boursière post-doctorale au Centre for Asian Legal Studies (CALS, NUS – Université nationale de Singapour).

Elle a aussi enseigné à l’université Thammasat, à Bangkok. Le Dr Eugénie Mérieau est également chercheure associée au Centre de recherche internationale de Sciences Po Paris, à l’Institut d’Asie orientale de l’ENS Lyon et à l’Institut de recherche sur l’Asie du Sud-Est contemporaine de l’IRASEC, à Bangkok (tous trois dépendant du Centre national de la recherche scientifique, CNRS).

Vous aurez deviné à travers son analyse que parallèlement à sa carrière universitaire, elle participe également à des activités de défense des droits de l’homme.

Parlant le thaï, elle a également animé une émission sur la chaîne Voice TV, Diva Cafe. À Bangkok, on se souvient encore des concerts qu’elle a donnés sous le nom de Blue Randôme.

Cette experte de la Thaïlande est régulièrement interviewée sur ce pays qu’elle affectionne. Ainsi, vous pouvez revoir l’entretien accordé à l’excellent média indépendant Asialyst, Le populisme de Thaksin Shinawatra où elle rappelle que « Thaksin reste l’homme qui divise la Thaïlande » :

Précédemment, RFI avait consacré un débat entre Eugénie Mérieau et Hughes Tertrais. Sous la conduite de la journaliste Marie-France Chatin, la politologue et l’historien répondait tous deux à la question « Où va la Thaïlande ? ». C’était à l’occasion des élections législatives du 24 mars 2019 en Thaïlande, les premières depuis le coup d’Etat du 22 mai 2014 qui a placé le pays et ses 69 millions d’habitants sous la poigne des généraux. Écoutez donc le podcast de l’émission.

In fine et toujours sur RFI, Eugénie Mérieau est revenue sur les origines des manifestations. Un utile complément radiophonique à son article reproduit ci-dessus que vous pouvez écouter sur YouTube. Cette fine connaisseuse du royaume de Thaïlande peut aussi être écoutée sur France Culture où elle a participé à plusieurs émissions.

Si l’analyse d’Eugénie Mérieau vous a passionné.e, lisez alors son article de fond Comprendre l’instabilité politique thaïlandaise : constitutionnalisme et coups d’État, paru dans la revue Politique Étrangère il y a 7 ans.

Retrouvez Eugénie Mérieau
➥ sur son site web
➥ et sur sa page Facebook

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Un regard complémentaire, celui d’Apichatpong

Apichatpong Weerasethakul by ChiuYun – © Facebook – Kinoimages.com

Vous avez sans doute déjà entendu parler du réalisateur Apichatpong Weerasethakul, Palme d’Or à Cannes en 2010 pour son film Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures. Il vit à Chiang Mai et met la dernière main à son prochain film, Memoria. En 2016, Apichatpong « Joe » avait d’ailleurs fait l’objet d’une rétrospective multimédia (The Serenity of Madness – Sérénité de la folie) – à l’occasion de l’ouverture du MAIIAM, un musée d’art contemporain de classe internationale sis à Sankhampaeng, à l’est de Chiang Mai.

L’interview que nous offre Télérama nous permet de saisir les changements profonds que soulève la contestation estudiantine de la jeunesse thaïlandaise. Apichatpong se pose en observateur – et soutien – du processus de désobéissance en cours. Il note que les étudiants bousculent de manière inédite une société bouddhiste très hiérarchisée, remettant en cause les liens entre les grandes familles, la richesse et le pouvoir, en parlant de sujets tabous. Et ce n’est pas du cinéma !

C’est le genre de lecture qui nous permet de mieux comprendre le processus sociétal en cours. Lisez donc son interview sur Télérama.

Les étudiants thaïlandais face au triangle Armée-Constitution-Royauté
C’est là une autre intervention académique dont nous conseillons la lecture. Composée en été 2020, avant les grands rassemblement du quatrième trimestre, c’est le fruit d’une réflexion proposée par Mme Marie-Sybille de Vienne, professeur à l’ Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco).

Elle y rappelle notamment la proposition en dix points de réforme de l’institution royale rendue publique le 10 août 2020 par l’United Front of Thammasat and Demonstration (inconnu jusqu’alors; leur page Facebook). Formulée à Bangkok durant une manifestation publique par Rung :

1. La révocation de l’article 6 de la Constitution de 2017, qui rappelle la position de vénération dans laquelle doit être tenu le souverain;
2. La révocation de l’article 112 du code pénal relatif au crime de lèse-majesté;
3. La révocation du Crown Property Act de 2018, libérant le Crown Property Bureau (CPB) de la tutelle du ministère des Finances et faisant de ses actifs la propriété du roi (et non plus de la Couronne), au titre de sa fonction;
4. L’établissement de l’allocation budgétaire du souverain en fonction du contexte économique;
5. La suppression des agences sous commandement du roi;
6. La suppression des dons des et aux fondations royales;
7. L’abolition de l’inviolabilité du souverain (article 6);
8- L’arrêt de la célébration de la monarchie dans les administrations publiques et l’éducation;
9. L’ouverture d’une enquête sur les morts de personnes ayant critiqué ou ayant eu des relations avec la Couronne;
10. Le non-entérinement des coups d’État par le roi.

Retrouvez l’article complet en lecture gratuite sur le site The Conversation (à soutenir donc).


ARTE Regards – Vers un printemps thaïlandais ?

L’on vous propose bien à propos ce reportage diffusé sur Arte et visible jusqu’au 3 février 2021.

En voici la présentation : Ils sont des dizaines à avoir quitté leur pays sous peine d’être emprisonnés ou assassinés. Depuis le coup d’État de 2014, un nombre grandissant de Thaïlandais dissidents sont contraints à l’exil alors que le pays s’enfonce dans une dictature militaire. Qu’ils vivent à Paris, à Berlin ou Helsinki, ils sont toujours régulièrement menacés de mort.

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Manifestations au fil de l’année 2020…

À travers notre page Facebook, nous vous avons régulièrement tenu informé.e des manifestations organisées tant à Chiang Mai qu’à Bangkok, et ailleurs encore. Retour en arrière avec quelques publications (d’utiles compléments se trouvent dans les commentaires de chacune d’elles) :
06.03.2020 : une des premières flash mob organisée à la CMU (l’Université de Chiang Mai)
18.07.2020 : en direct de Bangkok où des milliers de manifestants s’étaient alors réunis, en plein état d’urgence (une vidéo supprimée entre-temps mais un extrait est encore visible ici) !
20.07.2020 : la manifestation organisée en écho ici à Chiang Mai, porte Thapae
25.07.2020 : malgré la prolongation de l’état d’urgence, les aspirations démocratiques de la jeunesse du royaume ne tarissent pas
16.08.2020 : les manifestations continues de plus belle à Bangkok
19.09.2020 : le 19 septembre, jour ô combien symbolique, est le jour qui a été fixé pour une nouvelle manifestation de grande ampleur : une journée de mobilisation à l’université Thammasat, à Bangkok, lieu de sinistre mémoire…
14.10.2020 : autre grande manifestation antigouvernementale à Bangkok en cette Journée de la Démocratie
16.10.2020 : nouvel affront pour Prayut à Bangkok
17.11.2020 : et Chiang Mai qui continue de répondre par de nouvelles manifestations
17.11.2020 : le choc des photos alors que la répression policière envers les manifestants se durcit

Et l’année 2021 voit continuer ces manifestations en Thaïlande ! Sans parler du putsch opéré début février par les militaires de Birmanie, un coup d’état contesté dans la rue. Alors que Hong Kong voit sa démocratie se mourir…

Des modes d’action novateurs au geste aux trois doigts levés, les mouvements prodémocratie de l’Asie du Sud-Est s’inspirent les uns des autres, malgré des motivations différentes à leur origine. Lisez l’analyse de Carol Isoux qu’a publiée Libération : À Rangoun, Hongkong et Bangkok, les méthodes s’assimilent.


Loi sur le crime de lèse-majesté

Bien qu’elle soit décriée, c’est sur la base de cette loi qu’une Thaïlandaise a été condamnée cette semaine à pas moins de 43 ans de prison pour avoir insulté la famille royale, la plus lourde peine jamais enregistrée dans le royaume pour crime de lèse-majesté. Prénommée Anchan, cette fonctionnaire de 63 ans était naguère proche du réseau DJ Banpodj, un podcast politique qui s’en prenait à la monarchie. Son principal instigateur, Hassadin U., 64 ans, a d’ailleurs été condamné à 20 ans de prison. En 2017, un homme avait été condamné à 35 ans d’emprisonnement pour une série de publications et de commentaires sur Facebook. Dans un reportage radio, RTS Info revient sur le dernier de ces tristes dénouements judiciaires.

Comme nous l’a rappelé Eugénie Mérieau, l’abolition de cet article pénal est l’une des principales revendications du mouvement mené par la jeunesse protestataire. 

Article 112. Quiconque diffame, insulte ou menace le roi, la reine, le prince héritier ou le régent, est puni d’un emprisonnement de trois à quinze ans.

C’est précisément cet article du Code pénal thaïlandais que les jeunes, et avec eux les organisations de défense des droits humains, veulent voir être aboli.

Les étudiants ne sont pas les seuls à dénoncer l’iniquité de cette loi. Beaucoup d’ONG constatent que le gouvernement abuse de l’article 112 afin de limiter la liberté d’expression, un droit de l’homme inaliénable. Le rapport annuel d’Amnesty International sur la Thaïlande le mentionne à chaque fois. Et Amnesty de regretter que la Thaïlande soit toujours un État non abolitionniste pour ce qui a trait à la peine de mort, toujours inscrite dans la législation du pays (voir l’extrait du Code pénal ci-dessous).

L’ONG Thai Lawyers for Human Rights (TLHR) – qui a défendu Anchan – nous rappelle que l’article 112 du Code pénal thaïlandais (« lèse-majesté ») avait été suspendu près de 2 ans – à la demande de S.M. le roi Vajiralongkorn – depuis sa dernière application en 2018. Un article appliqué à nouveau afin de poursuivre les manifestants, les utilisateurs en ligne et tout individu dont les paroles et les actes sont considérés comme une diffamation envers la famille royale thaïlandaise.

Thai Lawyers a d’ailleurs dressé une liste précise des dénonciations pénales en lien avec cet article controversé : du 24 novembre au 17 décembre 2020, au moins 33 individus dans 20 procès ont été accusés de « lèse-majesté ». Parmi ces personnes figurent un mineur et des étudiants universitaires. Pour prendre réellement conscience des abus possibles de la part des autorités, sachez que parmi ces cas, la publication sur Facebook du message « Très courageux. Très bien. Merci » a été considéré comme une diffamation royale !

Dernière citoyenne à faire les frais de la loi de lèse-majesté, Amarat Chokepamitkul, députée de l’opposition (du parti Move Forward).

L’exposition « 112 the Exhibition » à Bangkok dénonce subtilement les abus du pouvoir en matière de lèse-majesté en Thaïlande. Elle est le fruit de l’artiste de rue thaïlandais connu sous le nom de « Headache Stencil ». Le Petit journal vous en parle.

Extrait du Code pénal thaïlandais (traduction libre) :

Infractions relatives à la sûreté du royaume
Chapitre 1 – Infractions contre le roi, la reine, le prince héritier et le régent

Article 107. Quiconque, assassinant le roi à mort, est puni de mort. Quiconque tentera de commettre l’acte susmentionné sera puni de la même manière. Quiconque, faisant un acte quelconque en vue de préparer l’assassinat du roi ou sachant qu’il y a la personne qui va assassiner le roi, ayant fait un acte quelconque pour aider à garder l’acte secret, sera puni de la prison à vie.

Article 108. Quiconque, commettant un acte de violence contre le roi ou sa liberté, sera puni de la peine de mort ou de la réclusion à perpétuité. Quiconque tente de commettre une telle infraction est passible de la même peine. Si cet acte est susceptible de mettre sa vie en danger, l’auteur sera puni de la peine de mort. Quiconque se prépare à commettre un acte de violence contre le roi ou sa liberté, ou accomplit un acte quelconque pour aider à garder le secret sur l’intention de commettre un tel délit, sera puni d’une peine d’emprisonnement de seize à vingt ans.

Article 109. Quiconque cause la mort de la reine, du prince héritier ou du régent est puni de mort. Quiconque tente de commettre un tel délit est passible de la même peine. Quiconque prépare la mort de la reine, du prince héritier ou du régent, ou accomplit tout acte pour aider à garder le secret sur l’intention de commettre un tel délit, sera puni d’une peine d’emprisonnement de douze à vingt ans.

Article 110. Quiconque commet un acte de violence contre la reine ou sa liberté, le prince héritier ou sa liberté, ou le régent ou sa liberté, est puni d’un emprisonnement à vie ou d’un emprisonnement de seize à vingt ans. Quiconque tente de commettre une telle infraction est passible de la même peine.
Si cet acte est susceptible de mettre en danger la vie de la reine, du prince héritier ou du régent, l’auteur de l’infraction sera puni de la peine de mort ou d’une peine d’emprisonnement à perpétuité.
Quiconque se prépare à commettre un acte de violence contre la reine ou sa liberté, le prince héritier ou sa liberté, ou le régent ou sa liberté, ou accomplit tout acte pour aider à garder secret l’intention de commettre un tel délit, sera puni d’une peine d’emprisonnement de douze à vingt ans.

Article 111. Quiconque apporte son soutien à la commission d’une infraction visée aux articles 107 à 110 est puni de la même manière que le responsable de cette infraction.

Article 112. Quiconque diffame, insulte ou menace le roi, la reine, le prince héritier ou le régent, est puni d’un emprisonnement de trois à quinze ans.

ThailandLawOnline – Criminal code B.E. 2499

Épine dans le pied du pouvoir thaïlandais en ce début d’année 2021, le populaire militant Arnon a été nommé comme l’un des leaders émergents du monde par le magazine TIME (TIME100 next 2021).

Le magazine américain relève qu’Arnon Nampa a un comportement modeste et un penchant pour s’habiller comme Harry Potter. Ce qui n’empêche pas cet avocat des droits de l’homme de faire trembler l’establishment de son pays. La Thaïlande est le plus ancien allié des États-Unis en Asie et a servi de rempart contre des voisins plus autoritaires, mais sa démocratie s’est érodée au fur et à mesure que les liens avec la Chine s’épanouissaient. Arnon a donné de l’énergie aux jeunes Thaïlandais en réclamant que le pouvoir politique soit retiré à la sacro-sainte famille royale et que la constitution rédigée par les militaires soit mise en pièces. En conséquence, il a été arrêté à trois reprises ces derniers mois et accusé de sédition (à l’heure où nous écrivons, il est encore incarcéré). Mais alors que le Covid-19 continue d’avoir un impact sur l’économie thaïlandaise qui dépend du tourisme, de plus en plus de jeunes se sont joints aux manifestations qui sont déjà les plus importantes depuis le coup d’état de 2014 – qui, selon les experts, met la pression sur le gouvernement militaire. « Les gens en ont assez de vivre sous un régime répressif », a-t-il déclaré au TIME à la fin de l’année dernière.

Découvrez le reportage que lui consacre le TIME (avec une vidéo à la clef).

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Mieux comprendre la Thaïlande

Si la Thaïlande vous attire, la lecture vous donnera les clefs pour mieux comprendre ce pays et ses habitants. Eugénie Mérieau écrit beaucoup sur la Thaïlande.

Nous vous avons déjà parlé de sa thèse de doctorat qui n’intéressera cependant pas celles et ceux attirés par les seules jouissances balnéaires qu’offre le pays ! Une thèse que vous pouvez acheter en version brochée ou alors lire gratuitement en version électronique.

Outre ce travail académique, nous avons sélectionné deux ouvrages qui devraient intéresser toute personne désirant voyager intelligemment au Pays du Sourire. N’hésitez pas à les commander chez votre libraire préféré (les liens renvoient à leur présentation sur Amazon).

Idées reçues sur la Thaïlande
Eugénie Mérieau

Souvent plus connue pour ses plages et son tourisme sexuel, la Thaïlande peine à se débarrasser des clichés, souvent sulfureux, qu’on lui accole : Triangle d’or et plaque tournante de la drogue, paradis des lesbiennes, gays et transgenres, royaume d’opérette, et, sur le terrain économique, le fameux Tigre asiatique ! Précis, concis et très documenté, cet ouvrage est une excellente introduction à ce pays, son histoire et ses habitants. Le meilleur moyen de dépasser ses idées reçues !

Commandez-le chez votre libraire préféré ou sur Amazon.

Les Thaïlandais. Lignes de vie d’un peuple
Eugénie Mérieau

Terre de paradoxes assumés, la Thaïlande, Pays du Sourire, se rit des contradictions qui la fondent comme elle se joue des contrastes qui l’habillent. Lors de son arrivée au royaume de Thaïlande, tout voyageur est frappé de constater l’apparente liberté dont jouissent les Thaïlandais – pourtant sous le joug d’une dictature militaire. Mais derrière son vernis pastel de carte postale se découvre la réalité de la misère, des bordels et de la corruption. Autour de Bangkok, la mégalopole folle, la Thaïlande rurale continue à cultiver ses rizières en escalier. Ces deux Thaïlande qui se font face, l’une rurale, l’autre urbaine, n’en sont pas moins unies par un impétueux sentiment national : la khwampenthai (la « thaïtude ») définit les contours de l’identité nationale grâce au motto Nation, Religion, Monarchie. 
Ministre, féministe, chauffeur de taxi ou révolutionnaire…, ils nous racontent ici leur vie, leur Thaïlande.

Éric Deseut nous parle de cet essai convainquant dans Le Petit Journal. Quant à Bernard Formoso, autre grand spécialiste de la Thaïlande et plus généralement de l’Asie, il se montre plus circonspect dans sa critique.

Commandez cet ouvrage chez votre libraire préféré ou sur Amazon.

Depuis la fin de l’année dernière, les jeunes contestataires ont mis un frein à leurs manifestations publiques de grande ampleur. Néanmoins, le mouvement continue de bouillonner, quelque peu réfréné par la récente flambée de contaminations dans le cadre de la pandémie sanitaire autour de la capitale (un sujet qui accapare les esprits en raison du bombardement médiatique quotidien alors que d’autres fléaux sanitaires continuent leurs ravages, en sourdine, à l’image du SIDA, du tabac ou encore de la dengue, sans parler des accidents de la circulation).

Si vous êtes arrivé.e jusqu’au terme de cet article, c’est que la Thaïlande vous intéresse vraiment. À travers les lectures que nous vous proposons, vous serez alors armé.e d’un regard critique bienvenu vous permettant d’aller au-delà de l’image idyllique véhiculée par l’Office du tourisme. Et sans doute que vous apprécierez alors d’autant plus ce pays fascinant aux multiples facettes, certaines peu reluisantes, il est vrai. Bienvenue en Thaïlande !


1 Une analyse publiée avec la fort aimable autorisation de son auteure que nous remercions encore une fois ici 🙏
Nous de disposons hélas pas des notes de bas de page de l’article original; veuillez nous en excuser. Nous sommes par ailleurs responsables du choix des illustrations qui accompagnent le texte.

Source de l’image à la une © Facebook – PPTV HD 36 (il s’agit d’une photo d’une manifestation tenue devant le ministère thaïlandais de l’Éducation, à Bangkok, le 16 janvier 2021, à l’occasion de la Journée des Enseignants).
Article composé le 20.01.2021 et mis à jour le 02.03.2021

28 juillet 2020 – Festivités en l’honneur de l’anniversaire de S.M. Rama X

Vive le roi ! L’éclosion des panneaux à l’effigie du roi régnant sur fond jaune vous a peut-être mis la puce à l’oreille. Ou alors est-ce le nombre inhabituel de Thaïlandaises et Thaïlandais tout de jaune vêtus qui vous a étonné ce matin et ces jours derniers. Le 28 juillet est en effet commémoré dans tout le royaume de Thaïlande l’anniversaire de S.M. le roi Rama X. Ce mardi est jour férié mais le week-end a été long puisqu’un jour férié a été octroyé hier, lundi, en compensation du Loi Krathong, le Nouvel An thaïlandais supprimé cette année de pandémie sanitaire. En quoi cela changera-t-il votre journée ? On vous livre les festivités organisées à cette occasion, nous consacrant principalement à Chiang Mai mais aussi à Bangkok.

Le mercredi 28 juillet 2021, Sa Majesté le roi Rama X fête ses 69 ans
Avec un pays en proie à une pandémie sanitaire sans précédent en cette année 2021, l’heure n’est pas à la fête. Nous ne mettons donc pas à jour cet article, nous contentant de publier un post sur notre page Facebook.

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Un couronnement récent

C’était l’événement historique de l’année 2019. Le précédent couronnement a eu lieu en 1950. Soit celui du père du roi actuel, Bhumibol Adulyadej le Grand, qui a régné 70 ans, de 1946 à 2016, année de sa disparition, vécue émotionnellement par nombre de Thaïlandais qui, pour la plupart, n’avait connu que ce seul roi, ô combien bien-aimé et qui n’est pas oublié. Couronné sous le nom dynastique de Rama IX, sa disparition a donné lieu à de fastueuses et fort émouvantes funérailles, après une année de deuil. Souverain constitutionnel, le roi est le chef de l’État et le protecteur des religions de Thaïlande.

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Sa Majesté Rama X © Facebook แวะ

C’est donc son fils, S.M. Maha Vajiralongkorn (มหาวชิราลงกรณ), désigné en 1972 héritier du trône, qui lui a succédé et qui a été officiellement couronné le 4 mai 2019 (lisez le portrait qu’en dresse FranceInfo). Vous avez pu suivre les fastueuses cérémonies royales sur notre page Facebook. Un faste semblable à celui de la cérémonie annuelle du labour royal sur la place Sanam Luang que le roi honore de sa présence. Il faut dire que la royauté thaïlandaise trône au sommet des monarchies les plus fortunées au monde.

Vous pouvez également feuilleter l’ouvrage (en anglais) intitulé The Royal Coronation Ceremony. Un livre qui relate les cérémonies de couronnement antérieures, avec les discours prononcés par tous les monarques de la dynastie Chakri, de même que les objets royaux utilisés pour la cérémonie. Vous apprendrez également les rituels bouddhistes et hindouistes sur lesquels repose cet événement; le livre contient des photographies rares des divers couronnements.

Le mardi 28 juillet 2020, Sa Majesté le roi Rama X fête ses 68 ans

Ce couronnement a permis aux sujets de Sa Majesté de mieux le connaître, lui et sa famille. À l’occasion de son 68e anniversaire, ce mardi 28 juillet 2020, les Thaïlandais sont invités à s’habiller de jaune, couleur du jour de naissance de Rama X (c’était également la couleur du précédent roi). Faites-en de même et les autochtones vous apprécieront d’autant plus. Notons encore que pour l’heure la Fête des Pères n’a point encore été déplacée à cette date.

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Festivités à Bangkok

Cette journée est marquée par un événement récurrent de la poste thaïlandaise : l’émission d’un timbre-poste spécial d’une valeur faciale de THB 10.-, une émission qui intéressera tous les philatélistes. Et sinon, de nombreuses manifestations sont organisées à travers tout le pays. Où le caractère symbolique est souvent présent comme ces tortues remises à la mer à Chonburi il y a trois ans (article et vidéo). 

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© Facebook – NationPhoto

À Bangkok, les monuments et les rues principales sont richement décorés; le drapeau thaïlandais flottera à plein vent aujourd’hui. Les ponts enjambant le Chao Phraya sont illuminés tout ce mois de juillet; un fleuve qui a vu la libération de poissons en l’honneur du roi. En soirée, attendez-vous à des feux d’artifice. Et n’hésitez pas à admirer les spectacles de danse traditionnelle.

Le roi se soumet habituellement à diverses cérémonies, accompagné de Sa Majesté la reine consort Suthida (สุทิดา) : aumônes matinales aux moines (un rite auquel se prête également le Premier ministre Prayuth Chan-o-Cha), tirs de canon, cérémonie royale dans la salle du trône Amarindra Vinijaya (où sont conviés la famille royale, les membres du cabinet et les dignitaires). Sous le regard protecteur de celle qui l’a toujours protégé, la reine mère douairière Sirikit, dont l’anniversaire est fêté le 12 août, jour de la Fête des Mères en Thaïlande.

Nous écrivons habituellement car cette année 2020, l’absence du roi en son royaume est remarquée. Toutes les cérémonies se déroulent donc en la seule présence de son effigie selon un protocole similaire à ce qu’imposaient les précédents rois, protocole présenté d’ailleurs sous un aspect négatif par le magazine Gala. La cérémonie matinale de prestation de serment des fonctionnaires du gouvernement a été retransmise en direct de Sanam Luang.

Maha Vachiralongkon Bodintharathepphayawarangkun, Xe roi de la dynastie Chakri, régnant sous le titre officiel de Phrabat Somdet Phra Vajira Klao Chao Yu Hua1

À la tombée du jour (ce mardi vers 19h), comme dans toutes les provinces du pays, les Thaïlandais prendront part à la traditionnelle cérémonie aux chandelles (à Krung Thep, comme les locaux appellent la capitale, cela se déroule sur l’immense place Sanam Luang). Un rituel suivi, cette année comme l’année dernière, d’un spectacle son et lumière à l’aide de dizaines de drones (à 19h15 à l’Université Thamassat (มหาวิทยาลัยธรรมศาสตร์ ท่าพระจันทร์), non loin de la place Sanam Luang, ici).

Ne sachant pas encore où la cérémonie sera diffusée en direct ce soir, on vous livre ici quelques photos de la somptueuse cérémonie nocturne de l’année dernière, une cérémonie diffusée sur Facebook :

Nos principaux articles sur Bangkok, envoûtante métropole :
▶︎ Nouveau à Bangkok : tour-de-ville en bus Hop on Hop off
▶︎ Festival annuel du tourisme thailandais au parc Lumpini
▶︎ Les guerriers chinois envahissent Bangkok
▶︎ Le père de l’art moderne thailandais est italien ? Si. Balades au gré de ses sculptures
▶︎ 1h15 pour relier Chiang Mai à Phuket (en hyperloop) en passant par Bangkok !
▶︎ San lak muang, le pilier protecteur de Bangkok

Au-delà de la capitale siamoise, sur l’initiative du précédent monarque, Bhumibol le Grand, francophone et ami de la Suisse, l’entrée aux parcs nationaux est gratuite aujourd’hui (mais seuls les Thaïlandais devraient en profiter, peut-être aussi les résidents étrangers qui sauront se montrer persuasifs… et souriants).

Plus spécifiquement à Chiang Mai : l’entrée est gratuite (pour tous) au jardin botanique de la reine Sirikit (QSBG, ouvert de 8h30 à 16h30).

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Nature sauvage des parcs nationaux © Facebook – Tourism Product

Festivités à Chiang Mai

Dans la Rose du Nord – et partout dans le royaume – les cérémonies solennelles sont nombreuses, au premier rang desquelles celles organisées par toutes les administrations et entités étatiques ces jours derniers. Il s’agit de rendre hommage à leur roi, comme ici au Bureau du Développement agricole de la province.

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Solennités de l’année dernière à Chiang Mai © Facebook – PR Chiangmai (1 & 2)

Cette année de crise sanitaire, nous n’avons pas retrouvé autant d’événements originaux comme ceux organisés l’année dernière : que ce soit cette cérémonie de chants célébrée par l’école Sapphitthayakhom, cette libération de dizaines de milliers de carpes dans la rivière Ping organisée par le Centre de conservation de la faune sauvage, ou encore cette revalorisation des canaux de la ville, ici à Sansai où des dizaines de bénévoles ont œuvré (une réjouissante revalorisation dont on se réjouit du résultat futur).

En revanche, la cérémonie d’aumônes matinales aux moines, à 7h au Centre des Congrès, a été maintenue. Elle a été suivie par une cérémonie officielle d’hommage en présence notamment du Gouverneur de la province. Le plus vénéré des temples bouddhistes du centre-ville, le Wat Phra Singh (วัดพระสิงห์วรมหาวิหาร, ici), est souvent utilisé lui aussi lors des cérémonies officielles.

L’anniversaire royal est souvent l’occasion d’un reboisement. L’année dernière, une telle action réunissait plus de 500 volontaires au Projet de développement forestier Khun Mae Kuang et des dizaines d’autres du côté de Mon Chaem, au Centre de développement Nong Hoi (une entité de la Fondation du Projet Royal). Cette année, l’action est nationale à travers un important projet de reforestation dont on vous a déjà parlé dans cette publication Facebook. Le pays compte reverdir d’ici l’année 2027 près de 3 millions de rai, soit plus de 400 000 hectares !

Ce n’est pas là une liste exhaustive, bien entendu, mais cela vous permet de voire que les Thaïlandais font généralement preuve d’imagination en honneur de leur souverain.

Il n’y a pas d’autres événements d’envergure attirant les touristes étrangers, ces derniers ne pouvant franchir les frontières qui sont fermées depuis plusieurs mois ! Contrairement à l’année dernière, pas de danses traditionnelles lanna sur la place Thapae, épicentre touristique (qui a récemment été prise d’assaut par de jeunes étudiants manifestant contre le gouvernement). Pas non plus d’hommage au roi sur un nouvel axe routier ni d’hommage public au parc Royal Flora, ce dernier ne s’étant déroulé que pour les employés. Mais comme c’est un jour férié, l’occasion reste belle pour visiter dans l’après-midi tant le Wat Phra That Doi Kham, au haut de la colline, que le Wat Ton Kwen tout proche, ce dernier ayant gagné en popularité depuis le grand succès de la série TV l’Odeur de la kasalong.

Autre défection, la parade « We Love the King Chiang Mai » en samlor n’aura elle aussi pas lieu. Ça été l’événement touristique phare de l’année dernière, organisé par des amoureux de Chiang Mai – la même communauté qui organise l’événement annuel We Love the King Parade le 5 décembre de chaque année, date de naissance du précédent monarque, Bhumibol le Grand.

Signalons pour terminer qu’à Chiang Mai comme dans toute la nation, ce jour est une occasion pour donner du sang (et nombre de Thaïlandais le font volontiers). Cela se passe au centre de collecte X de la province, en ville donc, de 8h30 à 15h30.

In fine, du samedi au mardi compris, il a fallu compter avec quatre jours de fermetures (tous les bureaux étatiques, certains musées, les banques et assurances – mais pas les centres commerciaux, etc.), féries obligent. La vente d’alcool n’est pas prohibée.

Bref, vous l’aurez compris, cette année de pandémie mondiale, conjuguée à l’absence physique du monarque, ne sera pas l’année la plus marquante en terme de célébration. Cependant, habillez-vous de jaune en cette journée spéciale si vous ne souhaitez pas sortir du lot. En conclusion de ces cérémonies d’hommage, nous ne pouvons que scander « Longue vie au roi ! » 🤴


1 Wikipédia

Source de l’image à la une © Facebook – Thai PBS World. Article composé le 28.07.2020 et mis à jour le 27.07.2021

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5 décembre en Thaïlande. Commémoration de l’anniversaire du roi Bhumibol Adulyadej

Le jeudi 5 décembre 2019, comme tous les 5 décembre, c’est jour férié au royaume de Thaïlande ! Cette journée fériée correspond à la date de naissance du défunt roi Bhumibol le Grand. De même qu’à la Fête des Pères thaïlandais. Célébration moins connue, c’est aussi la Journée mondiale des Sols, fixée ce jour-là en hommage au roi siamois. On évoque ici les festivités liées à ces trois événements fêtés simultanément.

Pour l’année 2020, vous devrez pour l’heure vous contenter de notre publication Facebook

Un jour férié

Comme l’an dernier, le Premier ministre, le général Prayut Chan-o-cha, invite tous les Thaïlandais à rendre hommage au défunt roi. C’est la raison pour laquelle vous verrez plus de personnes vêtues de jaune ce mercredi, couleur du jour de naissance du roi, un dimanche. Prayut, tôt le matin, présidait la cérémonie où officiaient 489 moines bouddhistes

Le 5 décembre est un jour qui a été maintenu férié malgré la disparition de ce roi bien-aimé. C’est tout un peu qui tâchera aujourd’hui de mener de bonnes actions en mémoire du roi.

S’agissant d’un jour chômé, il faut compter avec les fermetures habituelles (tous les bureaux étatiques, les banques et assurances – mais pas les centres commerciaux, etc.). C’est notamment le cas de certains musées comme le musée des maisons traditionnelles du Lanna. Précisons encore que la vente d’alcool n’est pas prohibée.


Commémorations à Chiang Mai

© Facebook – Glow On Concept

À notre connaissance, ici à Chiang Mai, pas de grande commémoration officielle comme en 2018 au parc royal Rajapruek (ou Royal Flora). C’est dommage car il faut bien avouer que ces cérémonies aux chandelles sont toujours très émouvantes. Ce fût notamment le cas de l’événement ayant attiré énormément de monde quelques semaines après la disparition du monarque. On parle ici de l’immense manifestation organisée le 5 décembre 2016 où l’émotion était à son comble.

Notez que toutes les communes (ou presque) de Thaïlande commémorent officiellement cette journée, à l’image de Tonpao et sa cérémonie dès 10h, mais rien de transcendant à Chiang Mai, ou du moins rien de public qui puisse intéresser le touriste ou l’expatrié. Il s’agit surtout pour les Thaïlandais d’effectuer des offrandes matinales aux moines – ceci afin d’acquérir du mérite1, notion essentielle aux yeux de tout bouddhiste thaïlandais – et de rendre hommage au roi devant son effigie. Comme ici à l’aéroport CNX de Chiang Mai.

Quelques événements d’envergure sont néanmoins annoncés :

  • Le Royal Flora organise quelques activités mais qui n’attireront au premier chef que les personnes thaïlandaises (ce sont des expositions et des ateliers en lien avec son engagement dans l’agriculture, voir ci-dessous). Une cérémonie d’hommage a lieu le mercredi 4 décembre, à 9h30 (il est demandé d’y participer habillé de jaune). Petit clin d’œil de la nature : un phénomène solaire annuel se déroule là-bas une vingtaine de jours au mois de décembre, de 16h50 à 17h20; l’année dernière, on pouvait l’observer jusqu’au 10 décembre.
  • Le Centre international d’expositions et de congrès de Chiang Mai avait été l’objet de la grande réunion regroupant l’ensemble des personnalités gouvernementales importantes l’année dernière. Mais comme cette année s’y tient la TCC Fair 2019, cet événement, le plus important organisé ici à Chiang Mai, a lieu au Centre des congrès de l’Université de Chiang Mai (CMU, หอประชุม มหาวิทยาลัยเชียงใหม่), durant la matinée du jeudi 5 décembre 2019. Cet album-photo vous montre ce qu’il en était.
  • Il est précédé d’une cérémonie d’hommage au Wat Jed Yod (วัดเจ็ดยอด) le mercredi 4 décembre 2019, en présence du gouverneur.
  • L’organisation d’une cérémonie bouddhiste sur l’esplanade du centre commercial Central Festival (เซ็นทรัล เฟสติวัล เชียงใหม่) ne semble être qu’un prétexte afin d’attirer le chaland (elle a cependant lieu alors tôt le matin, à 6h30, jeudi 5 décembre 2019, alors que le centre n’est point encore ouvert). En voici quelques photos. À l’intérieur du centre vous attend une exposition dédiée au roi.

Et comme à chaque grande commémoration, les Thaïlandais sont invités à donner de leur sang. La collecte officielle a lieu au principal Centre de collecte de la région 10 (ภาคบริการโลหิตแห่งชาติที่ 10 จังหวัดเชียงใหม่), le 5 décembre donc, de 8h30 à 15h30. Mais chaque donneur peut se rendre à tout moment pour cet acte ô combien empathique (qui, de notre point de vue, est une bien belle manière d’accumuler des mérites).

Les artistes, de leur côté, ne manquent jamais de composer des chansons en l’honneur du défunt – et bien-aimé – roi. Tel ce morceau intitulé L’arbre du père et interprété par un duo populaire ici à Chiang Mai, Mai Muang (ไม้เมือง).


Parade We Love the King

C’était là l’événement public marquant de la journée commémorative du 5 décembre dans la Rose du Nord : la grande parade internationale We Love the King qui arrivait sur la place des Trois Rois. Un défilé qui prenait de l’ampleur au fil des ans, impliquant des centaines d’intervenants et pas moins de badauds. Initiée par la communauté étrangère de Chiang Mai, l’événement fédérait une communauté hétéroclite allant des écoles internationales aux divers consulats étrangers, en passant par les associations d’expatriés. Les Thaïlandais n’étaient pas insensibles à cette marque d’affection vis-à-vis d’un roi, le défunt Bhumibol, qu’ils appréciaient. Et cela donnait un spectacle de toute beauté ! La manifestation honorait le présent roi, Sa Majesté  Maha Vajiralongkorn Bodindradebayavarangkun, Rama X, non sans oublier bien entendu de commémorer la mémoire de feu Sa Majesté le roi Bhumibol Adulyadej le Grand, de même d’avoir une pensée pour dame son épouse, Sa Majesté la reine douairière Sirikit.

Las ! Vous aurez cependant remarqué que nous avons utilisé l’imparfait pour vous parler de cet événement festif. Tout simplement parce que les organisateurs nous ont confirmé qu’il n’y aura pas de 8e édition de cette grande parade We Love the King cette année 2019, hélas, trois fois hélas 😫 Nous devrons dès lors nous consoler avec cette seule vidéo qui remémore avec émotion la parade vécue l’année dernière :


Et à Bangkok

Comme déjà indiqué ci-dessus, la cérémonie officielle qui verra convier l’ensemble des membres du gouvernement se tient à Bangkok, sur la place Sanam Luang (สนามหลวง). 489 moines recevront des aumônes à 7h du matin. Suivront à 8h30 une cérémonie d’offrande d’arbustes et, à 9h, une cérémonie d’hommage devant le portrait du roi Rama IX.

Une place qui sera animée du 5 au 14 décembre 2019. Toute la population, de même que les visiteurs de passage, pourra rendre hommage au roi. Il y a là une très belle exposition liée à la royauté, animée tant par des institutions étatiques que de grandes entreprises nationales. La nourriture thaïlandaise sera au rendez-vous. Les amateurs de folklore seront aux anges avec des spectacles traditionnels.

Horloge singulière. En vous rendant à la nouvelle gare ferroviaire de Bang Sue, au nord de Bangkok, vous pourrez voir une horloge géante affichant un seul chiffre, le neuf en version thaï, en hommage au défunt roi Rama IX. Cette gare moderne devrait entrer en fonction en janvier 2021 (plus de détail dans l’article du magazine Gavroche).


La Fête des Pères thaïlandais

Ce roi était considéré comme le Père de la Nation, c’est donc aussi la Fête des Pères en Thaïlande (une fête pour l’heure maintenue à cette date malgré l’accession au trône de son fils, Rama X, né, lui, un dimanche 28 juillet). L’avenir nous dira si les pères thaïlandais continueront à être fêtés ce 5 décembre – ce qui est fort probable tant Bhumibol était aimé de son peuple. C’était donc, lui aussi, un père aimant qui a élevé plusieurs enfants.

Gratuité des entrées pour les pères thaïlandais dans les parcs nationaux et au Night Safari, ici à Chiang Mai, des offres qui se renouvellent chaque année

La Fête des Pères, c’est surtout, comme partout ailleurs, une fête commerciale où il s’agit de consommer ! Les centres commerciaux ne sont pas les derniers à proposer leurs alléchantes offres. On le signale avec quelques réticences, mais sachez que ce mercredi 5 décembre les pères ont accès gratuit au Night Safari (เชียงใหม่ไนท์ซาฟารี), sans doute le plus beau zoo de Chiang Mai (évidemment, l’idée est d’y aller avec ses rejetons, qui eux paieront). De même pour les personnes nées le 5 décembre. Cette offre est la même au QSBG – Queen Sirikit Botanic Garden (สวนพฤกษศาสตร์สมเด็จพระนางเจ้าสิริกิติ์), soit le jardin botanique de la reine Sirikit, à Mae Rim (offre). Autre bonne nouvelle, mais qui ne concerne que les pères thaïlandais, l’accès à tous les parcs nationaux est gratuit aujourd’hui ! Rappelons ici que c’est le roi Rama IX qui a été l’instigateur de la création des nombreux parcs nationaux thaïlandais. Une cérémonie officielle est organisée, cette année le 4 décembre au Centre de pratique religieuse (Buddha Sathan, พุทธสถานเชียงใหม่); en voici quelques photos. Invité de marque, Frank Sethi, résident indien de Chiang Mai, l’un des lauréats du Father Of The Year Award.

Toujours est-il que Google célèbre régulièrement cette Fête des Pères thaïlandais à sa manière, avec un sympathique doodle. On vous laisse découvrir le doodle animé de cette année 2019, reproduisant ci-dessus celui de l’année dernière et ci-dessous celui de l’année précédente encore 😄


Journée mondiale des Sols 2019

JournéeMondialeDesSolsSignalons encore que ce 5 décembre correspond à la Journée mondiale des Sols dont le thème cette année est Empêchons l’érosion des sols, protégeons notre avenir. L’objectif est de sensibiliser la population sur l’importance du maintien d’écosystèmes sains pour le bien-être humain, en abordant les défis croissants liés à la gestion des sols,  et accroître la visibilité du thème des sols en encourageant les gouvernements, les organisations, les communautés et les individus du monde entier à s’engager activement pour améliorer la santé des sols. La qualité des sols pour l’agriculture, une problématique qui était chère au défunt roi, lui qui a tant œuvré pour instaurer une économie d’autosuffisance respectant et la nature et ses habitants (les membres des minorités ethniques, nombreuses ici au nord, lui en sont encore fort reconnaissants). Rappelons que le roi Bhumibol Adulyadej a reçu un prix décerné par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) afin de saluer son action exceptionnelle dans le domaine du développement humain, de la réduction de la pauvreté et de la conservation de l’environnement en Thaïlande. Un article du journal L’Express nous en parle.

Nos articles en lien avec les minorités ethniques présentes en Thaïlande :
Le musée tribal de Chiang Mai et son Festival de la Vie Tribale, un article qui vous présente brièvement toutes ces minorités ethniques;
9 août – Journée internationale des Populations Autochtones du monde;
Le Festival Akha de la Balançoire, ancien rite de fertilité
29 juillet, Journée nationale du Thaï, la langue officielle de la Thaïlande
Commémoration de l’anniversaire de feu le roi Bhumibol Adulyadej, grand défenseur des minorités ethniques de son royaume.

C’est avec beaucoup de reconnaissance – on laisse la fierté aux Thaïlandais qui, en l’espèce, la méritent – que nous avons appris que le choix du 5 décembre pour fixer cette Journée mondiale n’est pas un hasard : c’est justement en l’honneur du défunt roi que cette date – son anniversaire – a été choisie ! La communauté mondiale, à travers la FAO, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, salue ainsi l’engagement du roi Bhumibol pour les communautés agricoles, souvent bafouées, dont l’existence-même dépend de l’agriculture et donc de la qualité des sols.

En tant que « roi du développement », Sa Majesté a tendu la main aux populations les plus vulnérables de Thaïlande, sans se soucier de leur statut, de leur ethnicité ou de leur religion, a écouté leur problèmes et leur a donné les moyens de se prendre en charge.

Kofi Annan, secrétaire général des Nations Unies (2006), au sujet du roi Bhumibol le Grand

Cette journée est très populaire dans les campagnes du royaume. Sur cette page Facebook sont répertoriées toutes les initiatives organisées, et elles sont nombreuses. Ainsi l’année dernière, dans la région de Chiang Mai, c’était un séminaire de trois jours qui a été organisé au Bureau du district de Mae Chaem, avec une exposition à la clef. Cette année et comme déjà indiqué, une exposition vous attend au parc Royal Flora.

La Journée mondiale des Sols sur le net #JMS #WSD
Site web officiel (sous l’égide de la FAO; page Facebook et site web)
Page Facebook officielle (sous l’égide de l’IUSS – Union internationale des sciences du sol; page Facebook et site web)
Évènement FB officiel

Journée des Sols en Thaïlande
Page Facebook officielle (World Soil Day วันดินโลก)
Évènement FB officiel (วันดินโลก 2562)

La brève vidéo ci-dessous dresse l’historique de cette journée pour laquelle le défunt roi de Thaïlande a joué un roi essentiel.

Et si besoin était, ce film d’animation vous permet de prendre conscience de la réalité des ressources en sols dans le monde, couvrant les questions de dégradation, d’urbanisation, d’accaparement des terres et de surexploitation ; le film offre des options pour rendre notre façon de gérer nos sols plus durable. Les Thaïlandais ont réalisé une bien belle vidéo pour illustrer le sujet de cette année, soit le combat contre l’érosion des sols (et il n’y a pas besoin de comprendre le thaï pour en saisir les enjeux).


Nous reproduisons ci-dessous le communiqué officiel de l’Office du Tourisme de Thaïlande (TAT) quant à la commémoration de l’anniversaire du roi Bhumibol Adulyadej :

« Le 5 décembre demeure un jour férié en Thaïlande en l’honneur de l’anniversaire de naissance du défunt roi Bhumibol Adulyadej. À cette date la fête des Pères est également célébrée car le souverain était affectueusement considéré comme le « Père de la Nation ».
De son vivant, son anniversaire a toujours été une journée de fête nationale. Toutes les provinces du pays le célébraient à travers de belles festivités animées de feux d’artifice, de cérémonies aux chandelles ou encore de concerts de musique. Si les événements commémoratifs sont susceptibles d’être plus modérés dans les années à venir, il n’en reste pas moins que le 5 décembre restera un jour où les Thaïlandais continueront à rendre hommage à leur souverain bien aimé. À Bangkok, la tradition voulant que l’avenue Ratchadamnoen et les environs du Grand Palais soient somptueusement illuminés pour l’occasion sera perpétuée. Le roi Bhumibol Adulyadej était un photographe et un marin passionné, mais également un musicien renommé. Saxophoniste et clarinettiste accompli, son penchant pour le jazz l’a amené à composer ses propres œuvres. Cet amour du défunt roi pour la musique a inspiré la série de concerts gratuits « Concert in the Park », qui se dérouleront au parc Lumphini à Bangkok.
Le souverain a accédé au trône et est devenu Rama IX, le neuvième roi de la dynastie Chakri, en 1946 alors qu’il n’avait que 18 ans. Afin de permettre au jeune monarque de compléter son éducation, le couronnement fut retardé jusqu’en 1950. Il épousa la reine Sirikit le 28 avril 1950 et son couronnement eut lieu une semaine plus tard, le 5 mai. Le roi Bhumibol et la reine Sirikit ont mis en place de nombreux projets royaux et œuvré pour améliorer la vie des populations rurales à travers la Thaïlande. La compassion du couple et la longévité de leur règne les ont conduits à être perçus affectueusement par de nombreux Thaïlandais comme le « père et la mère de la nation ». C’est pourquoi tout comme l’anniversaire du roi marque également la célébration de la fête des Pères, l’anniversaire de la reine, le 12 août, est considéré comme le jour de la Fête des Mères. »

De son vivant, son anniversaire a toujours été une journée de fête nationale. Toutes les provinces du pays le célébraient à travers de belles festivités animées de feux d’artifice, de cérémonies aux chandelles ou encore de concerts de musique.

Celles et ceux désirant en savoir plus sur feu le roi Bhumibol Adulyadej pourront commencer par lire la fiche que lui consacre Wikipedia. La monarchie thaïlandaise est présente sur le web (c’est un site officiel, en anglais, quelque peu austère). Il y a également des pages Facebook panégyriques, à l’image de celles-ci : King Bhumibol The Great, Information Center for King Rama 9Nous aimons le roi Bhumibol Adulyadej – Rama IX (en thaïlandais) et Thai Royal Family News. Ou encore ce musée virtuel : 89 years of King Rama IX.

Le Roi Bhumidol et la famille royale de Thaïlande à LausanneLes férus de lecture plongeront avec délice dans l’ouvrage Le Roi Bhumidol et la famille royale de Thaïlande à Lausanne. Un livre qui révèle pour la première fois les souvenirs professionnels de Cléon C. Séraïdaris, précepteur particulier de Leurs Majestés les rois Rama VIII et Rama IX durant leurs études en Suisse, qui resta pendant vingt-six ans au service de la famille royale (il devait sans nul doute être fêté durant la Journée des Professeurs). C’est pour répondre au voeu de S.M. le roi Bhumibol de faire connaître la carrière de son précepteur auprès de la Famille Royale en Suisse que le fils de ce dernier publie cet ouvrage, quinze ans après la disparition de son père. Par discrétion et loyauté, Cléon C. Séraïdaris n’avait pas révélé ces épisodes historiques, estimant être astreint à un devoir de réserve. Ces pages n’auraient donc jamais vu le jour sans la suggestion du roi qui, lors d’une audience privée, encouragea l’auteur à éditer ce recueil (il en existe deux autres versions, en anglais et en langue thaïlandaise). Un témoignage unique, abondamment illustré de photographies et de documents issus des archives familiales de l’auteur, un point de vue intimiste et familial, une part de l’histoire du royaume de Thaïlande.

Autre ouvrage plus récent, celui de Marie-Sybille de Vienne, universitaire fine connaisseuse du sud-est asiatique (surtout son versant économique). Il s’intitule Thaïlande, une royauté bouddhique aux XXe et XXIe siècles. Vous y ferez connaissance des arcanes du pouvoir mis en place par Bhumibol, s’articulant autour du Conseil Privé, du Bureau des propriétés de la Couronne (CPB) et de la symbolique royale. Un système d’influence qu’assoit son fils, le roi régnant, S.M. Rama X, en continuant de moderniser cette royauté bouddhique de la dynastie Chakri. Une dynastie qui, pour l’heure, a su éviter la crise née de l’exceptionnelle durée du règne de son défunt père.


Retrouvez tous les articles que nous avons consacrés à Bhumibol le Grand sur cette page.

Vous pouvez revoir ci-dessous la gigantesque cérémonie d’hommage organisée en 2017 au pont Bhumibol qui enjambe le fleuve Chao Phraya  à Bangkok, quelques semaines après la disparition du roi bien-aimé.


1 L’accumulation de mérites est une notion essentielle du bouddhisme Theravada, la religion implantée en Thaïlande. Sur cette importante notion de mérite, on vous renvoie aux explication érudites d’Odon Vallet, historien des religions, dans le paragraphe ad hoc de notre article Wat Ton Kwen à Chiang Mai. Offrande de riz et feu en l’honneur du Bouddha.

Source de l’image à la une : © Facebook – Chiang Mai International Airport-CNX.
Article composé le 05.12.2019 et mis à jour le 09.12.2019.


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